Depuis plus de dix ans, Watertrek conjugue art et écologie pour réinventer notre rapport à l’eau. Fondée en 2013, l’association imagine des expéditions, des performances et des ateliers qui replacent cet élément vital au centre de nos vies. Sa directrice artistique, la comédienne Séverine Vasselin, insiste sur l’importance d’une approche à la fois sensible et tournée vers la transmission. " L’eau n’est pas seulement une ressource matérielle, elle porte aussi une charge intime et émotionnelle. Elle agit comme un miroir, révélant nos fragilités autant que notre capacité à faire corps avec le vivant."

"Pourquoi polluons-nous l'eau que nous buvons"

Ce regard intime sur l'eau s'accompagne aussi d'un constat brutal: pourquoi polluons-nous l'eau que nous buvons, et l'air que nous respirons ? Pour Séverine Vasselin, cette autodestruction s'enracine dans un déficit de connexion, à soi et au vivant:

Les crises environnementales ne sont que l'écho de nos clivages intérieurs. On se coupe de nos émotions, de nos besoins, et à l'extérieur, cela produit de la dévastation.

→ Séverine Vasselin, Fondatrice association Watertrek

Selon elle, il existe un lien étroit entre écologie et psychologie. L'eau reflète nos états intérieurs, fluide, parfois tumultueuse, capable d'engloutir mais aussi de soutenir. " Au bord de l'eau, j'ai appris à accueillir mes émotions, à ne pas plus en avoir peur. L'eau m'a enseigné qu'on pouvait être traversé par la douleur, le chagrin ou la colère, sans être submergée. Au contraire, c'est un chemin vers la résilience", confie la comédienne.

Noces d'eau, entre théâtre et performance

De cette expérience personnelle naissent des projets artistiques. En juillet 2025, l'association Watertrek a présenté à Paris une performance baptisée " Noces d'eau " à l'Académie du Climat, devenue pour l'occasion le théâtre de cette célébration imaginée comme un rituel de réconciliation entre la ville et son fleuve. Cent deux ans après l'interdiction de la baignade dans la capitale, La Seine s'ouvrait de nouveau aux corps et aux regards. " Reconsidérer la Seine comme un espace citoyen et sensoriel, pas seulement comme une voie navigable, c'est une manière de célébrer des retrouvailles. Comme un mariage après cent ans de séparation ", raconte Séverine Vasselin.

“chaussures orphelines”, incarnation de notre naufrage collectif à force de malmener nos liens au vivant Tout commence par l’apparition d’une figure féminine : une naufragée lestée de “chaussures orphelines”, incarnation de notre naufrage collectif à force de malmener nos liens au vivant. Ces fardeaux, métaphores de relations fragiles et de blessures sociales, la tirent vers le fond. Mais peu à peu, le corps se libère, la naufragée devient rescapée, et trouve appui dans la présence des autres. Les spectateurs, acteurs malgré eux, sont invités à s’enlacer, à participer à cette traversée symbolique. “C’est un double récit, celui d’une cité qui retrouve son fleuve, et celui d’un individu qui accepte de se réconcilier avec lui-même”, souligne la directrice artistique.

"Les noces d'eau", performance artistique de l'association Watertrek, était célébrée le 26 juillet 2025 à l'académie du climat à Paris 75004 Au delà des retrouvailles entre un fleuve et sa ville, le spectacle interroge aussi nos propres parcours intimes. Pourquoi a-t-il fallu cent ans pour réenvisager la baignade dans la Seine ? Cette lenteur reflète nos résistances à reconnaître nos erreurs, à affronter nos fragilités pour mieux les transformer. À travers ce parallèle, Séverine Vasselin esquisse une "autobiographie des liens", où l’eau devient un médiateur : elle relie l’intime au collectif et rappelle qu’en prenant soin de notre environnement, c’est aussi de nous-mêmes que nous prenons soin. Une ville sans son fleuve, comme Paris sans la Seine, est amputée d’un élément vital. Retisser ce lien, c’est comprendre que l’eau n’est pas seulement une ressource économique, mais un espace de vie, de mémoire et de culture, capable d’instiller une nouvelle manière d’habiter le monde.

L'eau au coeur de notre lien commun

Douze ans après sa création, l'association Watertrek poursuit son chemin en multipliant les collaborations artistiques et citoyennes, sur les rivières comme sur les littoraux. L’association a aussi fait du paddle et du kayak des outils d’exploration et de pédagogie. Expéditions collectives, relevés scientifiques, ramassages de déchets ou simples navigations partagées deviennent autant de manières d’apprendre à regarder l’eau autrement. Des centaines de volontaires, militants, artistes ou simples curieux, ont déjà embarqué dans ces aventures, participant à une écologie vécue autant que pensée. " L’eau est l’élément déterminant dans la survie de nombreuses espèces, dont la nôtre. En prendre soin, c'est replacer l'eau au coeur de notre lien commun ", résume Séverine Vasselin.

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